Mussolini et l'affaire Matteotti en 1924

La découverte du corps de Matteotti, le 16 août, par la police déclenche une nouvelle vague de protestations, mettant en danger le gouvernement de Mussolini.

Mussolini fait face aux attaques de Matteotti

Lors de l’une des premières séances du nouveau Parlement, le député socialiste Giacomo Matteotti a osé prononcer un discours d’une heure et demie dans lequel il a dénoncé, preuves à l’appui, les violences qui ont faussé le résultat des élections législatives. Son réquisitoire bien documenté suscite une folle colère dans les rangs fascistes. Mussolini, à son banc, reste immobile pendant le discours de Matteotti, les bras croisés, mais les lèvres esquissant une moue de mépris. Né en 1885 dans une famille très aisée, Giacomo Matteotti, riche propriétaire terrien, a adhéré par idéal au Parti socialiste.
Giacomo Matteotti récidive devant les députés. Il a rassemblé tous les anciens articles de Mussolini et ne cesse de les citer pour mettre le Duce en complète contradiction avec son passé. Le « socialiste millionnaire », comme le surnomme Mussolini, est considéré comme un adversaire fort redoutable, car il possède des fiches et des dossiers qui font trembler ceux qui n’ont pas la conscience tranquille. Matteotti a l’intention d’interpeller le gouvernement sur les spéculations financières auxquelles sont liés des dignitaires fascistes. Il doit révéler que la franc-maçonnerie italienne a financé les préparatifs de la marche sur Rome. Aldo Finzi et De Bono sont compromis.
Benito Mussolini fait au Parlement un discours conciliant. Il affirme qu’il entend gouverner dans le cadre parlementaire. Si un renforcement de l’exécutif lui semble nécessaire, il admet l’utilité d’une opposition constructive. Il réfute totalement que les élections ont été altérées par la fraude et la violence. Il cite des journaux de l’opposition lançant des appels pour que le gouvernement soit renversé par la force. Il rappelle que les partis battus se plaignent toujours de fraudes diverses. Quant à la violence, il fait remarquer que l’opposition déplore un mort, mais les fascistes ont eu 18 tués et 147 blessés. Le Parlement a renouvelé par un vote sa confiance au Duce.
Benito Mussolini, réconforté par la confiance du Parlement, songe à former un gouvernement d’union nationale où entreraient des députés libéraux, des socialistes et même des populaires. Il déclare au général De Bono qu’il est prêt à donner des responsabilités aux socialistes. Il lui annonce également son intention de dissoudre la milice fasciste ainsi que le Grand Conseil. De Bono, effrayé par les nouvelles dispositions de Mussolini, et surtout par le fait que Matteotti doit révéler au Parlement les « combines » de certains chefs fascistes, dont il fait partie, avec la franc-maçonnerie, décide de passer à l’action. Il veut donner une bonne correction à ce Matteotti.

L'enlèvement de Matteotti

Un commando s’empare du député Matteotti en plein centre de la ville. Il se défend avec courage dans la voiture des ravisseurs, pousse des cris et parvient à briser d’un coup de pied une vitre de la Lancia qui s’élance vers le pont Milvius. Un des kidnappeurs poignarde Matteotti, qui meurt en répandant beaucoup de sang. Les assassins vont tourner jusqu’à la nuit dans la campagne romaine avant de trouver un endroit pour cacher le corps. Une fosse est creusée près de Quartarella, à une vingtaine de kilomètres de Rome. Le corps du député y est rapidement enfoui, non sans mal. Les criminels doivent lui trancher la tête, car le trou est bien trop petit et pas assez profond pour le corps du député.
La femme de Giacomo Matteotti, inquiète de ne pas revoir son mari, alerte la police dès le 11. Mussolini, apprenant la nouvelle, s’écrie : « Les imbéciles ! Ils l’ont tué ! C’est pire qu’une faute grave ! Ils le paieront ! » Le 12, la police a découvert que la Lancia a été louée au garage Trevi par Coline Baldeschi, au nom de son patron Fillipeli, qui est directeur d’un journal pro fasciste. L’enquête policière révèle la responsabilité du sous-secrétaire d’Etat à l’Intérieur, Aldo Finzi, qui a démissionné, et surtout du général De Bono, qui est destitué de son poste de police. Les responsables fascistes Cesare Rossi, Giovanni Marinelli sont également emprisonnés. La police arrête peu après tous les complices : Dumini, Volpi, Viola, Poveromo, Malacria et Panzeri. La disparition de Matteotti provoque une vague d’indignation dans l’opinion publique et même chez certains fascistes. En signe de protestation, les divers députés de l’opposition quittent le Parlement et ils se bornent à attendre que le roi convoque Benito Mussolini pour le destituer.
La découverte du corps de Matteotti, le 16 août, par la police déclenche une nouvelle vague de protestations, mettant en danger le gouvernement, malgré les mesures prises contre la presse. Les fascistes les plus extrémistes, guidés par Farinacci, fulminent contre la passivité du Duce devant « l’audace de l’opposition ». Mussolini avoue son inquiétude à l’ambassadeur de Grande-Bretagne. Il se dit résolu à rétablir l’ordre coûte que coûte et mentionne qu’il y a mille fascistes en prison et cinq mille qui attendent d’être jugés. Il ne cache pas qu’il subit la pression des extrémistes de son parti, réclamant une plus grande liberté de manœuvre pour venir à bout de leurs ennemis, et que, dans sa situation précaire, il ne peut se permettre de s’opposer aux ultras, dont Farinacci. Il reste hésitant sur le chemin à suivre. Il refuse de faire saisir certains journaux hostiles au régime fasciste. 

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